Les deux barques

Je suis une barque
Le petit frère de mon grand frérot
Je suis né un jour de tempête
Sans gréement et non ponté
Mon maître-pêcheur me fit aussi solide que mon grand frère.
Fait pour la mer
Pouvant fendre les vagues comme une lame
Résister aux plus grands roulis, affronter les plus hauts tangages
Autant pour les coups de vent que pour le vent en poupe.
Je suis une simple barque
Fait pour la pêche
Comme un vieux chien de chasse
J’accompagnais toujours mon Maître-pêcheur
Certain jour, ce n’était pas la mer à boire
Une récolte pauvre, triste, nous revenions au quai
Certains jours nous prenions un coup de mer
Mais jamais assez pour en avoir le mal de mer.
Parfois, loin du rivage, à la recherche d’un ban de pêche miraculeux
Nous affrontions les flots incessants
C’est alors que mon Maître-pêcheur modulait son chant
Aux rythmes des clapotis des vagues sur ma coque
À cet instant, nous ne faisions qu’UN.
Aujourd’hui je suis une vieille barque
Comme mon maître-pêcheur
Les marées nous ont rattrapées
Nos corps se sont usés à coup de vagues et de lames
Mes flancs se sont décolorés, le bois usé buvote l’eau.
De temps en temps, à l’heure des vacances et des beaux jours
Des enfants viennent me prendre et partent à l’aventure
M’enivrant de leurs rires et de leurs cris de joie
Je retrouve cette joie de vivre d’autrefois.
Je suis une barque à la retraite
Ce poème, à travers la métaphore d’une barque vieillissante, célèbre la relation intime entre l’homme et la mer, mêlant souvenirs de gloire et mélancolie du temps qui passe. L’image finale, où la barque retrouve un peu de sa jeunesse grâce aux rires des enfants, apporte une touche d’espoir et de tendresse à ce récit empreint de nostalgie.